Dans cette série, Meaghan Matthews engage un dialogue entre les racines de mangrove et le verre soufflé et coulé, assemblant des éléments disparates pour explorer les tensions entre nature, histoire et identité. Les racines, arrachées à leur sol d'origine et suspendues sur des murs, perdent leur fonction première, leur orientation naturelle. Sciées, coupées, elles subissent une transformation : leur développement est stoppé, leur mouvement figé. Pourtant, elles persistent, accrochées comme des fragments d'un récit transgénérationnel à recomposer.
Le verre, ajouté aux racines, coule et s'étire, imposant son poids et sa gravité sur la structure organique. Par cette confrontation, Matthews crée une tension palpable : la mangrove porte le poids du verre, subit une symbiose forcée, comme une métaphore des luttes invisibles mais enracinées dans l’histoire personnelle et collective de l’artiste. Le bois et le verre s'imbriquent et cohabitent, dans un équilibre précaire qui semble à tout instant pouvoir céder.
Cette série traduit une quête identitaire profonde, nourrie par l’histoire cachée de l’artiste, métisse d’origine martiniquaise, face à un passé colonial complexe. La mangrove, ramenée de Martinique, devient ici une racine déplacée, arrachée, tout comme les récits et mémoires transgénérationnels souvent perdus ou tus.
L’accrochage vertical évoque une chute avortée, un mouvement suspendu entre l’attraction terrestre et l’évitement. Ces formes, bien que figées, portent en elles une arborescence qui raconte une mutation : elles ne sont plus ce qu’elles étaient, mais elles ne sont pas encore tout à fait autre chose.